LETTRE OUVERTE
Lettre ouverte de François Grisé, fondateur et directeur général de Un et un font mille et du Mouvement HABITATS, et du Dr Stéphane Lemire, gériatre et président-fondateur de la Fondation AGES, représentants du collectif « Agissons ensemble pour le mieux-être des aîné·e·s ».
CHANGER LES MONDES DES AÎNÉS
Dans ce monde où on a souvent l’impression que tout va mal, on oublie facilement que, chaque jour, de nombreuses personnes agissent pour le bien ou simplement le mieux. Elles se mettent en action pour transformer les diverses réalités du vieil âge.
Sans pouvoir changer le monde, ces personnes changent “les mondes” de chaque aîné.
Les réalités de la vieillesse et du vieillissement sont souvent perçus à travers un même “trouble anxieux”, nous donnant l’impression que tout va mal au Québec. Cette vision anxiogène peut même laisser croire que notre société se dirige vers un redoutable « gériageddon ».
Alors que nous nous apprêtons à souligner la Journée internationale des personnes aînées le 1er octobre, nous croyons qu’il faut, ensemble, parler et célébrer tout ce qui marche. Nous croyons qu’il faut rendre visibles les personnes et les organismes qui changent les mondes que représentent chaque vieille personne, chaque famille, chaque voisinage, quartier, communauté, ville et territoire.
Bien sûr, comme vous, nous avons lu et entendu parler de la solitude, de l’isolement, du désœuvrement, du sentiment d’exclusion et de la désaffiliation sociale des aînés. On met en première page la maltraitance, les escroqueries financières, les évictions de leur milieu de vie, les “profitages de personnes vulnérables”, les abus physiques et psychologiques de toutes sortes envers les vieux. On débat sur tout ce qui les touche : le manque de ressources humaines, de services dédiés aux soins à domicile et du manque d’alternatives adaptées pour favoriser les déplacements autonomes.
Et bien sûr, il faut en parler. Il faut s’insurger, dénoncer l’inacceptable et apporter l’attention publique sur ces sujets. Il faut continuer à s’énerver, à se battre, à se fâcher pour être entendu et faire évoluer les pratiques, les systèmes, les communautés.
Mais aujourd’hui, nous voulons vous inviter à célébrer tout ce qui va bien face aux nouvelles réalités de la vieillesse et du vieillissement.
Rendons visibles les actions des dizaines de milliers de personnes qui, chaque jour changent des mondes en agissant pour briser l’isolement, défendre les droits à la dignité, à être soigné, à une plus grande qualité de vie, à être inclus dans la société, à l’engagement social, à ne pas subir d’âgisme, à ajouter de la vie aux jours nombreux de notre longévité nouvelle.
Célébrons cette longévité. Mettons tous l’épaule à la roue pour que toujours plus de gens puissent se sentir fiers de vieillir au Québec.
Le jovialisme n’est pas une option. Mais dans cette lucidité qu’offre le temps qui passe, nous croyons qu’il faut rétablir l’équilibre des forces entre ces chroniques des désastres annoncés et ces histoires plus quotidiennes qui, tous les jours, apportent sens et réconfort.
Nous parlons aujourd’hui au nom de centaines de personnes, citoyens, membres et représentants d’organismes qui eux, en représentent des dizaines de milliers et qui, tous les jours, agissent et continueront d’agir pour le mieux-être des aînés.
Nous croyons qu'en unissant nos forces, nous amplifierons notre impact et créerons un mouvement collectif puissant.
Nous nous réclamons du droit à la lumière qu’apporte chaque geste de soin et de soutien qui vise la dignité personnelle et collective de ceux et celles qui nous ont mis au monde.
Et chacun d’entre nous croyons qu'en donnant visibilité à ce qui fonctionne, nous nous rendrons compte que ces gestes à échelle humaine représentent la réelle base sur laquelle construire et devenir des moteurs de changement pour nos institutions. Tous les morceaux sont là. Faisons-les grandir, interagir, s’intégrer. Et si nous ne pouvons pas changer le monde, changeons les mondes que représentent chaque expérience du vieil âge.